Edité par Lilyan Kesteloot, Amadou Hampâté Bâ, Christiane Seydou, et Alfâ Ibrâhîm Sow
Collection Classiques Africains. Paris. Armand Colin. 1974. 149 p.
annabaajo filikaa kaananke; kayru wii: “Ko yaawani wara laamu, sanka fedde timmina sii laaɓa, yo wadde jaayɓe laamoo ana nyaama ; nde tilii nyaamde fuu nyalla na nyaaƴa; 1235 jemma waala ley rewɓe na ɗaartoo, ɗacca golle muuɗum ana faatoo ; walaa fuu ko hemroyi oo laamu so naa tan rimaama e ley makko a”. Rimee laamu barkintaa neɗɗo. 1240 Neɗɗo jaayɗo fay so mo ɓii laamu, ardataako fii muuɗum moƴƴa ; nde ŋabbi laamu huuwan wannyiminde b wanaa hono ɓe njiɗoyaa wada moƴƴa, ɓe mbaawoyaa, walaa ley tagu maɓɓe, 1245 ɓure tafaaka loowaa ley maɓɓe! Nde rotere maɓɓe jooɗii dow karka, karka laamu nii nyalla na muƴitoo, ɓe dukan toowa, paɗe tappa e leydi! Ɓe leydinaaki fay njiyataa kammu; 1250 cukku duule ɗee kaadime mum'en; wanaa mbonki kuuwrata koo, mbaawaa, walaa e maɓɓe moƴƴere sako ɓannga! Golle maɓɓe luuttii mo c saahiiɓe, safuɓe annde, kuuwooɓe ko nyeenyi, 1255 nyeegotooɓe so na njaha, kenyataako, kenyontoobe moƴƴere so na waɗoyee. Golle ɓee e ɓee too so nii palondirii, niisondiroya faa gootel ɗigga. So jaayɓe mbaawii jam yalta e saare, 1260 fii jananɗo jaggee ana nyaamee; nyaamde teete, teetan kala fuu ko yii! So saahoyliɓe ɓee keɓi mbari jaalli, |
le Prophète couronné roi : “Ce qui a tôt fait de tuer le pouvoir, disait-il, qui disperse le groupe royal et l'anéantit, c'est d'introniser des vauriens qui mangent tout le temps, passent les jours à se pavaner et les nuits auprès des femmes, à les caresser ; qui laissent leur travail prendre du retard et n'ont accédé au pouvoir avec aucun mérite hormis celui d'être nés dans le commandement.” Naître dans le pouvoir ne qualifie point l'homme. Un vaurien, même s'il est fils de roi, ne peut diriger et que tout se passe bien. S'il accède au trône, il commettra des actions détestables ; ce n'est point qu'ils ne désirent faire le bien, mais ils ne le peuvent; il n'est pas dans leur nature 1. Les vertus point ne furent forgées et coulées en eux. Quand leur siège se pose sur le trône, ils y passent la journée à faire des simagrées; ils crient fort, tapent le sol de leurs chaussures. Dépourvus de toute humilité, ils ne voient même pas le ciel. Ils pensent que les nuages sont leurs serviteurs. Ce n'est point par méchanceté qu'ils agissent : c'est plus fort qu'eux Le bien n'est pas en eux, comment se manifesterait-il ? Leur action s'oppose à celle des sages qui ont puisé le savoir et font ce qui convient, qui marchent avec lenteur et jamais ne s'agitent, qui font diligence s'il leur faut bien agir. Quand leurs actions se heurtent à celles des autres, elles s'écrasent à réduire l'une des deux en poussière. Si les vauriens l'emportent, la paix quitte le village. Le bien d'autrui, on le pille et le dévore. A manger le bien volé, on razzie tout ce qu'on rencontre. Si les sages réussissent à vaincre, à dominer, |
Notes a. Dans ce passage où l'emploi de maggu / maagu était celui que grammaticalement l'on attendait, l'assimilation de laainu (classe ngu) à la catégorie nominale o est une personnification. b. Lire wanyiniinde. c. Bien que, dans ce passage, golle eût pu appartenir à la catégorie nominale ɗe, on l'emploie souvent, dans le langage ordinaire, en l'assimilant aux nominaux de la classe o des personnes. |
Notes 1. Est-ce une espèce de déterminisme? peut-être; un vaurien ne peut-il s'améliorer? Pourquoi? parce qu'il n'a pas la graine du bien en lui, certes; mais ici, c'est, de la part de Bâgoumâwel, un avertissement et une mise en garde destinés au nouveau roi afin qu'il n'introduise pas dans sa succession, par népotisme, un individu sans valeur; Joom-Jeeri le comprend d'ailleurs parfaitement ainsi, comme le prouve le vers 1273. C'est peut-être encore (tue espèce d'excuse qui inciterait à l'indulgence envers les mauvais, prétextant qu'ils ne sont pas entièrement responsables de leurs méfaits; or ceci renvoie plutôt à l'hypothèse d'un déterminisme, d'une prédestination. |