Maître-assistant à la Faculté des Lettres de Dakar
Editions ABC. Paris, Dakar, Abidjan. 1975. 109 pages
Collection Grandes Figures Africaines
Direction historique: Ibrahima Baba Kaké. Agrégé de l'Université
Direction littéraire : François Poli
Au début du XIXI siècle, un mouvement révolutionnaire bouleverse le territoire des Haoussa, situé au sud du Niger et au nord du Nigeria actuels, Il menace le pouvoir des petits souverains locaux. Il a été déclenché par un Fulani (Peul), le shehu Othman dan Fodio (Maître Othman, fils de Fodio) qui a levé l'étendard de la guerre sainte. Il va déboucher sur la constitution de l'empire de Sokoto. Les conséquences de cette chevauchée fantastique vont peser lourdement sur cette région de l'Afrique.
Othman dan Fodio n'a pas engagé la partie contre les seigneurs haoussa sans mesurer ses chances: les Haoussa ne forment pas un groupe tribal, c'est une communauté d'ethnies d'origines diverses, mais qui parlent une même langue. Aux environs de l'an 1000 de notre ère, ils se sont installés dans la savane, entre les fleuves Hiber et Jamarri. Là, ils se sont mêlés à la population autochtone avant de la dominer et de se partager le pays. En 1754, ou 1752 (selon les sources), quand naît Othman dan Fodio, l'autorité de ces roitelets est incontestée.
Contre ce pouvoir établi, Othman dan Fodio peut compter sur les communautés Fulbe (Peuls), ces migrants installés de plus en plus nombreux dans la région. Ils sont de sa race et se sentent particulièrement brimés par les seigneurs haoussa, qui les assujettissent à de lourds impôts. Il peut egalement compter sur les lettrés musulmans et les communautés qu'ils influencent à travers tout le pays : l'Islam est parvenu jusqu'ici par les antiques routes du désert qu'empruntaient les commerçants arabes. Propagée par des marabouts qui jouissaient, grâce à leur instruction, d'un grand prestige, la religion du Prophète a touché, progressivement, les seigneurs, les courtisans et le peuple. Malgré tout, si les seigneurs islamisés avaient adopté les noms musulmans et certaines coutumes, comme les sacrifices rituels ou la grande prière du vendredi, ils refusaient souvent d'appliquer la doctrine sociale du Coran, et la propagande des marabouts leur reprochera de ne pas renoncer à tous les cultes païens de leurs ancêtres.
En fait, le Coran sera l'arme idéologique d'Othman dan Fodio. Il le propagera pendant trente années, jusqu'aux environs de l'an 1800, jusqu'à ce que s'engage contre les seigneurs l'épreuve de force. L'empire de Sokoto s'établira sur leur ruine.