Journal des africanistes, 63 (2) 1993 : 61-80.
94. Durii ngoonga dunyi fenaande feewti e Kaabata yennaama kaa yoɓtaaki, Bookari Saalihu! |
94. Il fut de la Vérité le berger, bouta hors le mensonge et prit pour but la Kâba ! Insulté, il ne rendit point la pareille, Bôkar Sâlif ! |
95. Woppaalibw jawdi njahoori kaŋŋe e kaalisi mo jaggaaki sako jammboo yo Bookari Saalihu! |
95. Il ne laissa aucune fortune pas plus sur pied qu'en or ou argent, point ne fit de commerce, encore moins d'actions frauduleuses : tel fut Bôkar Sâlif ! |
96. Mo naataali suudu jananndu jannde mo jantanaa jammbaaki yammbini diina, Bookari Saalihu! |
96. C'est un homme qui jamais ne viola la demeure d'autrui et qui n'est cité que pour l'étude Il ne commit nulle fourberie et donna grand essor à la religion, Bôkar Sâlif ! |
97. So mo hejjitiima mo miila Allaahu naafoya wanaa naafiqaaku nanaa e Bookari Saalihu |
97. Si, au cœur de la nuit, il s'éveillait, c'était en pensant à Dieu pour des prières surérogatoires. D'hypocrisie jamais on n'entendit parler à propos de Bôkar Sâlif ! |
98. So mo fa'i misiide so waktu faatiima ndeebx henyoo sonaa ɗum mo howlaa huunde fuu, ɓii-Saalihuby! |
98. S'il se rendait à la mosquée, l'heure étant dépassée, alors il se pressait hormis pour cela, pour rien d'autre il ne se hâtait, le fils de Sâlif! |
99. Obz mooyoowo moyŋaro yeeso moƴƴuɗo moosugol mobz moonaaki mooptude ca yimɓe, Bookari Saalihu! |
99. Il avait démarche posée, visage splendide et sourire parfait, lui qui jamais ne montra la moindre réticence à rassembler les gens, Bôkar Sâlif ! |
100. Fiddaali ilagte peerticb fii mum fiindoyii fijiraali ɗaayɗe mo ɗankoyaa ɓii-Saalihu! |
100. Il ne fut guère indiscipliné lorsqu'au monde s'ouvrirent ses yeux et son existence s'épanouit sans qu'aux futilités il se fût amusé, bien qu'il fût sans laideur, le fils de Sâlif ! |
101. Ɗaanaaki sabu dewe ɗakkoyfiɗo wanyaande fuucc buge Taalɓe, dammbe daneeje, Bookari Saalihu! |
101. Il sacrifia le sommeil à ses dévotions, se tenant à l'écart de tout acte haïssable ! Buge 16 des Tâl, noble et pure lignée, Bôkar Sâlif ! |
102. Suufiiɓe soomi innde Allah ɓe mbii “Huwa” haawniima hono ɗum fenniraa ɓii-Saalihu! |
102. Ce furent les Soufis qui voilèrent le nom de Dieu et dirent « Lui » 17. Il est surprenant que cela ait été faussement imputé au fils de Sâlif |
103. Ɗum joy, ɗowaa jeegom, mo hiisii faamoyaa soomaamacd ley ɗum sirru Bookari Saalihu ! |
103. Voilà 5, ajoute 6 : qui fait le compte petit comprendre qu'a été, là-dessous, dissimulé le secret de Bôkar Sâlif ! |
104. Go'o maaɗa tawa ɗiɗi tawta tati tappoy e nay ɓam joy e jeegom, jeeɗɗi jeetati tummboyaa |
104. Ton 1 trouve le 2 et rencontre le 3, tape-le contre le 4, prends le 5 puis le 6, insères-y le 7 et le 8 ! |
105. jeenay so tawtii sappo faandike sirru oo sappo e go'o woni oo damiirice mo leyɗataa toownoydo yonkicf nde laamni Bookari Saalihu! |
105. et lorsque le 9 a atteint le 10, il se trouve à l'orée du secret : 11 est ce pronom personnel (huwa), duquel plus rien ne doit être déduit et qui apporta élévation de l'âme en purifiant Bôkar Sâlif ! |
Allaahu yaafam yaafoyo saaraaɓe am sakiraaɓe am yaafiiɓe Bookari Saalihu! Allah suuram, suura aalamu kullucg mum sabuch Annabiijo Nulaaɗo muuɗum ci Muhammadaa ! |
Dieu m'accorde Son pardon et l'accorde à mes parents et à mes proches qui ont donné l'absoute à Bôkar Sâlif ! Dieu m'accorde Sa protection et l'accorde à tout Son univers par la grâce du Prophète Soit Messager, Mouhammad ! |
Poème composé par Amadou Hampâté Bâ à Bamako les 19, 20, 21 et 22 février 1940 à l'occasion du décès de son maître Tierno Bôkar Sâlif Tall, mort à Bandiagara le 19 février 1940. Le texte a été établi et traduit par Christiane Seydou.
Notes bw. A. yoppaali. bx. A. nii. by. Les vers 97 et 98 sont intervertis dans la version B. bz. o et mo sont omis dans la version B. ca. mooptude : moobtude. cb. A. gila feerti gite fiddaali. cc. A. hutaande fuu. cd. A. suudaama. ce. A. damiiru, Ai. damiir (pronom personnel) cf. A. e toownoyɗo wonki. cg. Ar. 'alam, kulli “tout l'univers” (l'ensemble des choses créées). eh. A. gam. ci. A. meeɗen. |
Notes 1. Cette image fait référence au tissu le plus prisé poui la confection des turbans : une mousseline teinte à l'indigo, d'un bleu noir très foncé et à reflet métallisés d'un très bel effet. 2. « Lui », en arabe huwa correspond en valetu numérique au chiffre 11 qui va ici être expliqué. C'est en effet ce chiffre qui a été au centre même de la destinée de Bôkar Sâlif, en raison des conflits internes qu'il introduisit au sein de la confrérie de la Tidjâniyya en opposant tenants des douze grains et tenants des onze grains. |