Classiques Africains. Paris. Julliard. 1969. 181 p.
Taton ɓee worɓe ngonti no kaatineejea
gaɗaaɗe na taybiniib ley gaabuguuruc
Sawtini daande saatiri semmbe sanne 45
nde wii : « Ee mon onon ɓed ɓe fooyre nannyi!
Njehee naatee e toggere maamiraare
adiinde e caƴƴe kala fuu nokku keɓ-ɗon.
Lohee, ndiiwee, ndogee, nanngee ko keɓ-ɗon
ngaɗon ɗum kirse mooɗon duppoyaaɗe. » 50
Hammadi tawtinii Hamtuudo Demburu.
Ɓe corki e cooɓe ɗee fa ɓe njiiti yeendu,
ɓe mbari ɗum kutti naɓi ɗum faa e boowal.
Ɓe kuɓɓoye yiite mawnge ɓe tippoyii hen. 55
Ɓe toowti ɓe doomoyii faa rocca hanta.
Nde metangal nyaamunoo tewf oo fa hanti,
ɓe nantoyg sawtu goɗɗo na sonka sanne :
— « Ee mon Hammadi, Hamtuudo, Demburu,
sadaka mo ittu-ɗon oo kaah jaɓaama.
Jahaangal mon to yaamana-juuju leyɗei, 60
Notes
a. haatannde forme ici son pluriel en kaatine contrairement à ce qui se passe ailleurs comme au Fuuta-Jalon où il devient haatande ou haatane.
b. Forme verbale dérivée de tati selon le processus tatiɓinii, tat(i)ɓinii,, tatɓinii qui se transforme finalement en tayɓinii pour des raisons euphoniques.
c. Lexème formé à partir des deux mots bambara gwa (foyer, cuisine par extension) et bugu (maison au toit de chaume).
d. ɓee (syllabe longue dans cette position) a été raccourci pour des considérations rythmiques.
e. hubɓoyi.
f. teewu.
g. nan(i)toyi, nantoyi.
h. Particule d'insistance.
i. leyɗe yaamana-juuju. Cet exemple de bouleversement de la syntaxe ordinaire se reproduira souvent dans la suite de ce poème. C'est un procédé poétique usuel qui correspond aux exigences rythmiques de la poésie quantitative.
Tous les trois se retrouvèrent comme les pierres
disposées en triangle dans le foyer domestique 1.
Se fit entendre une voix 2, une voix très bruyante
« O vous-mêmes-là que la lumière fascine 3 !
Allez et pénétrez dans le bois-ancêtre
du premier hameau des contrées que vous atteindrez.
Chassez, courez, poursuivez, attrapez 4 ce que vous trouverez
puis égorgez-le en victime holocauste 5. »
Hammadi se joignit à Hamtuudo et à Demburu.
Ils firent une battue sous bois, découvrirent un fourmilier 6,
le tuèrent, le dépecèrent, le transportèrent au carrefour.
Ils allumèrent un grand feu, y jetèrent leur gibier.
Ils restèrent et attendirent qu'il fût consumé.
Quand la flamme eut consumé la chair,
ils entendirent une voix qui criait avec force:
« O vous Hammadi ! Hamtuudo ! Demburu !
le sacrifice que vous venez de faire est agréé.
Votre voyage au pays des génies-nains 7
Notes
1. Trois routes; de plus, c'est une analogie avec le foyer de la cuisine africaine traditionnelle, car le foyer dont il s'agit ici servira à la « cuisine du savoir ».
La cuisine familiale est, du reste, un lieu sacré; et on l'appelle la matrice de la mère, « le foyer où cuit l'enfant ». Les trois pierres « sont unies par la marmite comme le père, la mère et l'enfant dans la famille »; les trois fourches entre les pierres du foyer sont comme « l'écorce, le fruit et le grain de la vérité ». De même ici, les trois hommes sont unis par l'aventure, ce voyage en commun, hasard prédestiné, voulu par les dieux.
2. Intervention de la voix-guide, qui, désormais, ne les quittera plus; c'est une émanation de Kaydara qui les attire et qui les repoussera lorsqu'il leur aura donné l'or. Cette voix sera répartie dans les quatre éléments.
3. La lumière n'était qu'un mirage, un décor. Ce n'est pas là que se trouve l'intérêt.
4. Car l'adepte doit déployer un effort.
5. La victime devra être brûlée à petit feu et non égorgée seulement.
6. Animal mystérieux car il vit de fourmis et de termites; or la termitière est considérée comme un monde (cf. Dieu d'Eau de Marcel Griaule). Les chasseurs considèrent donc le fourmilier comme « chargé » de puissance occulte, d'effluves dangereuses. De même, la tête du lapin et celle de l'hyène sont « chargées » et le hibou l'est entièrement.
7. Pour les Fulɓe, il y a trois pays :