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Layteere Koodal e Lootori
L'éclat de la grande étoile suivi du Bain rituel
Récits Initiatiques Fulɓe de Amadou Hampâté Bâ

Edité par Lilyan Kesteloot, Amadou Hampâté Bâ, Christiane Seydou, et Alfâ Ibrâhîm Sow
Collection Classiques Africains. Paris. Armand Colin. 1974. 149 p.


       Table des matieres      

Layteere Koodal — Strophes 116-145

Njehen abba, kooten wuro meeɗen;
welii kam, ko kaal-ɗaa seynii kam.
Mbaten jemma han nii faa weeta; 120
ɗoyɗi mbaata, gite mbaala na ndaara.
Mi ɗaanataako, miin oo faa weeta! »
Sammburua ruttoyli faatoyb faada;
mo wari mo naati tawi yiite na huɓɓa,
mo duncic cunkumal faa mete keewa
ɗemle pooye pooɗii ana ŋabba,
ɗiiloyilɗe ana taƴa ana weeya, 125
muta e mbeeyu hono nguun moɗoyan ɗe.
Ɓiɗɗo Sammburu ana ƴeewa;
babbiraaɗo hinnil ana dunca ;
mo wii mo : « Abba haal, aan kettii-mi!
Janta warde, noppam faa kaara! 130
Babbiraaɗo teɓɓii nii fooɗi
nowru ɓiɗɗo wii : « Ko waɗi so ndu famɗi,
yo nande nyannde fuu ko ndu nanoyaano;
kuɗɗe belɗe maa mettuɗe sanne
haɗi ndu yaaja, wuddiɗi non takki! 135
Ko jantotoo-mi koo dow too iwri
irii e leydi wirfitii fuɗi yalti,
wonti lekki batu waɗa ley makki,
mawɓe Waalo jannguɓe ley Jeeri,
nyeenyɓe haala moyyuɓe seesiiɓe,140
yulɓe annde dowrowe kaawniiɗe,
be kaakataako ngara kaaltira seese,
keewɓe needi, waalooɓe na miila,
nyalla ƴeewde, taykaade e faamde,
ɓe paatoraaka fay ngel anndal mum.145
Partons, père, rentrons chez nous.
Ce que tu m'as dit, m'a plu et réjoui.
Que notre assemblée nocturne jusqu'au jour se prolonge ;
que meurent les sommeils et que mes yeux veillent la nuit.
je ne dormirai point moi-même jusqu'au lever du jour ».
Sambourou s'en retourna et vers sa demeure chemina.
Il arriva, entra, trouva un feu encore allumé 1
repoussa la bûche pour activer la flamme
dont les langues étincelantes, s'étirant, montaient
pour se perdre en flammèches tournoyantes,
plongeant dans l'espace comme par lui avalées.
Le fils de Sambourou, impatient, observa ;
le père continua à attiser la flamme;
il lui dit : « Parle, père, c'est toi que j'écoute !
Vienne le récit, s'en rassasient mes oreilles! »
Le père attrapa, puis tira 2
l'oreille du fils et dit : « Ce qui la rend si petite,
c'est d'entendre chaque jour ce qu'elle n'avait pas ouï.
Des nouvelles agréables ou fort déplaisantes,
en l'empêchant de grandir, l'ont raccourcie et plaquée !
Ce que je vais rapporter, de là-haut est venu 3,
sous terre s'est abrité, a germé, ensuite est ressorti
pour devenir un arbre où se tiennent les assemblées
des vieux du Waalo, des lettrés du Jeeri 4,
des maîtres de la parole, des bons et des paisibles
qui ont percé les savoirs suprêmes et merveilleux,
qui ne se précipitent point pour venir, parlent avec calme
et qui, pleins de bonne éducation, passent la nuit à méditer,
le jour à regarder, à soupeser pour comprendre
et auxquels rien n'échappe pas même la moindre des choses.
Notes
a. Bien que cette orthographe soit ici maintenue, c'est Samburu qu'il faut lire pour se conformer au mouvement rythmique du vers.
b. Le suffixe verbal -i de l'accompli narratif actif faatoyi a été élidé comme l'exige le mouvement général du vers.
c. Forme verbale obtenue à partir du radical duny- (« pousser ») auquel le morphème -it- infixé donna une valeur répétitive ou intensive; le suffixe verbal -i étant celui de l'accompli narratif actif, on avait, à l'origine, la forme verbale dunyiti. L'infixe de dérivation -it- se réduisit par la suite à -t- (phénomène courant en fulfulde) et la forme initiale devint duny (i) ti ou dunyti. Alors, le contact des sons /ny/ et /t/ donna le son nouveau /c/ comme cela se produit dans de nombreux cas en fulfulde. Aussi, dunyti devint-il dunci dont la valeur intensive est évidente, cette forme ne pouvant plus accepter le morphème intensif -it-.
Notes
1. Il s'agit du feu sacré de la maison, allumé dans chaque famille et qu'on ne laisse jamais éteindre, car cela correspondrait à l'extinction de la famille; l'un des souhaits que l'on formule est : « que Dieu n'éteigne pas le feu de ta famille ».
2. Geste d'affection ou de correction; ici c'est les deux à la fois : le fils se montre impatient, son père se moque doucement de lui.
3. Là-haut : idée d'inspiration plus que de révélation.
4. En général les vieux du Waalo ne connaissent que la science du Waalo, de même que ceux du Jeeri ne sont initiés qu'à celle de la brousse; il s'agit donc de vieux plus savants et qui cependant se divisent sur l'Étoile.