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Amadou Hampâté Bâ et Germaine Dieterlen
Koumen. Texte initiatique des Pasteurs Fulɓe.

Cahiers de l'Homme. École Pratique des Hautes Études, VIe section. Mouton et Cie. Paris, 1961, 95 pages.


      Table des matieres      

Douzième Clairière — Le dénouement des noeuds (suite)

[1] Après le quatrième, il reçoit le ɓirdugal, récipient en bois ou en calebasse dans lequel on trait le lait.

[2] Après le cinquième, Sile demande la corde à attacher les veaux, danngol.

[3] Kumbasaara est un laare associé à la résurrection. Sa « naissance » est en relation avec le sacrifice effectué pour un défunt le troisième jour après sa mort et qui consacre la séparation du corps et de l'âme immortelle. Quatre sacrifices sont exécutés pour chaque défunt, le premier, exécuté après le décès et avant l'enterrement, concerne le cadavre ; le second, mentionné ci-dessus, et le troisième effectué le septième jour, consacrent la séparation définitive de l'âme et du corps ; le quatrième, exécuté le quarantième jour, libère cette âme de sa dette et de ses liens avec le monde terrestre ; à partir de ce moment elle peut inspirer les vivants et communiquer avec eux.
Les Fulɓe se frottent les mains et les pieds avec la mue d'un serpent, laquelle protège des morsures des reptiles et des attaques des esprits.

[4] Après le dénouement du sixième nœud, Sile demande le maagol, ceinture spéciale des bergers.

[5] ndett, laare nocturne et chtonien, est le patron des bergers qui sont chargés de faire paître le troupeau la nuit, après la traite du soir, pour le ramener au premier chant du coq. Ces pasteurs reçoivent une initiation particulière concernant l'astronomie, car ils dirigent le troupeau en fonction de la position des étoiles. Le caméléon symbolise d'une part la prudence : il avance lentement les pattes l'une après l'autre, comme pour s'assurer de son terrain. D'autre part, la détermination : car ses yeux mobiles observent ce qui se passe sans qu'il tourne la tête, c'est-à-dire sans qu'il change de direction ou de ligne de conduite. Ses variations de couleurs ont un sens favorable, car il met les autres à l'aise en s'adaptant à eux ; un sens défavorable, car il témoigne aussi d'une certaine hypocrisie. Certaines parties du corps du caméléon sont utilisées dans la confection de philtres qui donnent du courage.

[1] — Je demande un ɓirdugal. Foroforondu continua ses questions par : « Sile, qu'est-ce que ceci ? »
— Ceci est le cinquième des douze et le treizième des vingt-huit enlacements. Il contient le secret de pellel connu chez les fils d'Adam comme un dieu sans nectar, habillé de blanc, tantôt frère de jalaañ, tantôt son fils, mais de toutes manières venant après siti kon. Ce dieu est chargé d'une foudre occulte qui, dirigée sur un homme, pulvérise son âme et réduit ses os en poussière. Flatté par : jatikon, matikon, jati matikon mawikon, quand pellel noue, personne ne peut dénouer. »
— Salut à celui qui vient de dénouer l'énigme du cinquième des douze et treizième des vingt-huit enlacements. Que Sile choisisse ce qu'il veut posséder. »

[2] Sile demanda un danngol.
Foroforondu donna le danngol et continua par : « Sile, qu'est-ce que ceci ? »

[3] Sile : « Ceci, c'est le sixième des douze et le quatorzième des vingt-huit enlacements. Il contient le secret des maniements de kumbasaara, laare féminin qui naît dans un cimetière après trois jours de travail de l'accouchement. Sœur de jalaañ, tantôt considérée comme sa fille, puînée de pellel, kumbasaara est vêtue d'un fourreau abandonné par un serpent lors d'une mue. »
Foroforondu lui dit : « Salut à celui qui vient de dénouer l'énigme du sixième des douze et quatorzième des vingt-huit. Que Sile choisisse ce qu'il veut posséder. »

[4] Sile lui demanda un maagol. Foroforondu lui donna un maagol de trois cent soixante coudées et continua ses questions par : « Sile, qu'est-ce que ceci ? »

[5] — Ceci, c'est le septième des douze et le quinzième des vingt-huit enlacements. Il contient le mystère du laare considéré par les fils d'Adam comme cadet des enfants de jalaañ. Il préside les nuits des printemps et paît les étoiles dans l'espace. Il ne voit jamais le soleil sous peine de communiquer son feu à la terre qui s'enflammerait. Ses esprits résident dans les eaux ou dans les airs, mais jamais directement sur la terre. Il se désaltère du sang qu'on tire d'un caméléon en lui coupant la queue. Il est flatté par :
kuy-kuy mbeelu, kay-kay mbeelu
kuy doote jay doote.
Ce laare a nom ndett ou nden. »
Foroforondu : « Salut à celui qui vient de dénouer l'énigme du septième des douze et du quinzième des vingt-huit. Que Sile choisisse ce qu'il veut posséder. »