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Cheikh Hamidou Kane/L'Aventure ambiguë/

Paris, Julliard, 1961. 209 pages


Chapitre II


le disciple le plus pauvre, le plus mal habillé du foyer et lui ordonna d'échanger ses hardes contre les habits neufs de Samba Diallo, ce qui fut fait à la grande joie du disciple. Samba Diallo revêtit avec indifférence les haillons de son camarade.
Tous les disciples étaient revenus. Chacun d'eux avait repris sa tablette et rejoint sa place en un grand cercle. La Parole, scandée par toutes ces voix juvéniles, montait, sonore et bienfaisante au coeur du maître, assis au centre. Il considéra Samba Diallo.
Le garçon lui donnait entière satisfaction, sauf sur un point. Le regard perçant du vieil homme avait décelé chez l'adolescent ce qui, à son sens, à moins d'être combattu de bonne heure, faisait le malheur de la noblesse du pays des Diallobé, et à travers elle du pays tout entier. Le maître croyait profondément que l'adoration de Dieu n'était compatible avec aucune exaltation de l'homme. Or, au fond de toute noblesse, il est un fond de paganisme. La noblesse est l'exaltation de l'homme, la foi est avant tout humilité, sinon humiliation. Le maître pensait que l'homme n'a aucune raison de s'exalter, sauf précisément dans l'adoration de Dieu. Encore qu'il s'en défendît, il aimait Samba Diallo comme jamais il n'avait aimé un disciple. Sa dureté pour le garçon était à la mesure de l'impatience où il était de le débarrasser enfin de