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Cheikh Hamidou Kane/L'Aventure ambiguë/

Paris, Julliard, 1961. 209 pages


Chapitre II


qu'on me prévienne et je m'en excuserai publiquement. A tous, je demande que me soient pardonnés les maux particuliers que j'ai pu commettre et le grand mal qui a tenu à ma fonction de chef des Diallobé. « Hâtezvous, s'il vous plaît, je vous attends. »
— « M'a-t-on pardonné ? » s'enquit-il à mon retour et tout le monde vit l'inquiétude qui l'agita alors. Je répondis que tous avaient pardonné. Il me posa trois fois cette question. Il eut ensuite la force de saluer tous ceux qui étaient autour de lui. Il me demanda mon bras qu'il serra fort, souhaitant que je fisse de même du sien, et mourut en prononçant le nom de Dieu. Grande Royale, ce fut un chef, votre père, qui me montra, à moi qui traduis le Livre, comme il faut mourir. Je voudrais transmettre ce bienfait à son petit neveu.
— Je vénère mon père et le souvenir que vous en avez. Mais je crois que le temps est venu d'apprendre à nos fils à vivre. Je pressens qu'ils auront affaire à un monde de vivants où les valeurs de mort seront bafouées et faillies.
— Non, madame. Ce sont des valeurs ultimes qui se tiendront encore au chevet du dernier humain. Vous voyez que je blesse la vie dans votre jeune cousin, et vous vous dressez en face de moi. La tâche, cependant ne m'est pas agréable, ni facile. Je vous prie