Classiques Africains. Paris. Julliard. 1969. 181 p.
— « Yaare nganyaandi, kaalnaa kam no watteea,
ndiyam ɗanyoyee e nder ndii leydi maaɗa;
ɗam woni yaayiraajam nguurndameeje,
miin e sakiraaɓe am ana maaya ɗomka. 200
Njurum, ndeeraaku boosori-maa-mi Kaydar ».
Yo ndeen dee yaare ndee duu jaɓɓitii wii :
— « Nanngee ngolb, tac oonyee ndarto-ɗonno
fa nde majjir-mi on fuu mbowloyonno
— « Eehee maaɗa, ɓinngel yaaya ɓalli; 205
kammu waɗaama kam woni gurmu leydi
onon toɗɗa fa doomoya jarriborɗi.
Sikke walaa minen kerniiɓe ndoondii,
ngad min lohinoo nde hirsaa fetti koyɗe.
ƴiiƴam puuci fade muuɗum juɗeede. 210
Ngaa daabaawa ɗee woni kaawnoyiinga,
tonndu ngiroowu, ɗemngal morri nyorwii.
Wonde suudiiɓe nanngii wonki magga,
ƴiiƴam magga fedoyii yor e leydi.
Miɗen mi paati Kaaydara biirnoyiiɗo, 215
tawee ana woɗɗi sanne badiiɗo Kaydar.
Kuncee kuurle fuu kala ɓiɓɓe diƴƴe
kaɗooje ƴyeede caalli to leyɗe Kaydar.
Amen kirsaangab ƴiiƴam mum jaɓaama.
Wonii ndee huunde Joo-mooɗon goƴiima. 220
Kuncee kuurle, kuncee kuurle haakoy.
Kaydara kaa jaɓii on mbaawaa salaade. »
Yaare nde wiirninoo tan Demburu tuggii
ana yima jaati konngol artinaangol.
Ɗoon nde mo wowli « on mbaawaa salaade », 225
ko yoornoo e feeyo majjiri ɗannoyiiɓe.
Ɓuraa taaɓannde ɓanngi e maɓɓe yayre
filiinde e nawre, danewal diƴƴe ɓuuɓɗe.
Taton giƴiraaɓe paati ndiyam na buura.
Notes
a. waɗ(e)tee, waɗtee, wattee (radical waɗ).
b. laawol est sous-entendu.
c. ta est la forme réduite de wata.
d. daabaawa est sous-entendu.
— « Scorpion d'inimitié, tu me diras comment faire
pour avoir de l'eau dans ce pays tien ;
l'eau, mère de toutes les existences !
Mes proches et moi-même, nous mourons de soif
Pitié et compassion ! je t'en conjure par Kaydara ».
Alors le scorpion lui répliqua et dit :
« Prenez ce chemin, ne faites ni détour ni arrêt.
Dès que vous m'aurez perdu de vue, vous direz :
“Ô toi, fils de la mère des corps vivants !
Le ciel lui-même fut créé toit pour la terre
et vous fûtes désignés comme gardiens 1 des épreuves.
Il n'y a pas de doute, nous répandîmes les cendres 2
du gibier que nous chassâmes, victime aux pieds agiles.
Son sang se répandit avant qu'il fût brûlé.
Assurément, cet animal était mystérieux ;
groin de porc et langue vermiforme visqueuse.
Dès que les invisibles eurent saisi son âme,
son sang se coagula, desséché sur la terre.
Nous allons de ce pas chez Kaydara l'invisible,
Kaydara le lointain, Kaydara le bien proche.
Soulevez tous les voiles, ô vous fils des eaux ! 3
qui rendez invisibles les rivières du pays de Kaydara.
De notre victime, le sang fut agréé.
A votre Maître, on fit boire cette liqueur.
Soulevez les voiles, soulevez donc tous les voiles.
Kaydara l'ayant accepté, vous ne pouvez refuser !” »
Aussitôt que le scorpion disparut, Demburu s'appliqua
à redire en chantant la formule évoquée.
Dès qu'il eut dit : « Vous ne pouvez refuser »,
tout ce qui était sec sur la plaine disparut.
A un pas des voyageurs, s'étendit une vallée
attenant à une mare aux eaux limpides et fraîches.
Les trois amis vers l'eau se précipitèrent.
Notes
1. Il s'agit des nains de Kaydara qui sont sensés protéger les voyageurs.
2. Rappel du sacrifice accompli suivant le rite demandé par la Voix qui les a entraînés dans cette aventure, et agréé par la divinité.
3. Esprits des eaux particulièrement invoqués ici. Cette incantation est magique; on doit la répéter mot pour mot, si l'on veut qu'elle soit efficace. Noter que le scorpion semble parfaitement au courant de l'histoire des voyageurs; il sait qu'ils ont sacrifié un fourmilier.