Classiques Africains. Paris. Julliard. 1969. 181 p.
Ɓe mbiyondiri :
— « Njehen ley makki ɗoon nii poofto-ɗen ne
ko newnata warana en faa itta laaɓa 445
ko way hono koyɗi kuli-kuli koyɗi meeɗen ».
Homo fu e worɓe meen ɓee nanngi nokku
lelii lejjii e caggal muni na sinngii.
Yolbere maɓɓe ɓaawo dumunna yaltiia.
Ɓe ɗomditi ŋoottiniib kala tampe njaltii.a 450
Ɓe mbii fa be ŋoyɓinoo tan lekki ɓoldi,
tiba muni huncitii yehi huuri njoorki.
Kii too yoori way hono defreteeɗec
tuma tuppiiki feewti e makki wuurtii.a
Taton giyiraaɓe gonti e naange wulnge, 455
nguleeki mbuduuri soortii e maɓɓe ɗoyɗi.
Walaa fu ko fonndetee fota kaaweseeji;
e hono oo dammbitittee bidiga gaɗɗo?
Demburu wii:
« Biɓɓe yaayam, ko woowaa nyaaku wommba e piindukid 460
tampittaako ley cate maayɗe yoornie.
Enen duu mbaylo-ɗen ne njehen ne ley mbilitikki;
ɗalen ne ɗalaakid keccol. »
Taton giyiraaɓe ndoondii kaaki eggi.
Ɓe njehi sori ɓuumrif 465
ndaa kii nguurtinaaki.
Yo ndeen Hamtuudo duu wii:
— « Haya koo mi sikkitaaki,
en naatii leyɗe kaayɗe. 470
Gite na njiya golleteeɗe
tawee hakkille faamaa.
Ko njii-ɗaa fuu yo Kaydar,
nanaa yaha faa to Kaydar.
Mo jey miin oo yo Kaydar.
Ko ɗum haɗi ɓernde tinde 475
anndina maale
beemnuɗe min to leyɗe
Kaydara gelle muuɗum?
Notes
a. L'allongement de la voyelle finale est dû au rythme du vers.
b. La forme d'origine est ŋood(i)tinii.
c. leɗɗe est sous-entendu.
d. lekki est sous-entendu.
e. ley cate ki maayde yoorni ou bien ley cate lekki ki maayde yoorni.
f. Forme dérivée de la racine verbale ɓuuɓ- exprimant l'idée de fraîcheur et d'humidité.
Ils se dirent entre eux :
« Allons donc là sous l'arbre, ainsi nous prélasser
afin qu'une accalmie en nous vienne effacer
ces semblants de cauchemars que nous avons vécus ».
Chacun de nos hommes choisit une place
et s'y coucha, étendu le dos collé au sol.
Un instant après, leur faim avait disparu 1.
Ils furent désaltérés, délassés ; toute fatigue les quitta.
Dès qu'ils eurent commencé à dormir, l'arbre s'effeuilla,
sa frondaison se défit et alla orner un arbre mort.
Et le premier sécha comme du bois de cuisine
pendant que revivait l'arbre en face planté.
Les trois amis se retrouvèrent sous un soleil aride
dont la chaleur de plomb les tira du sommeil.
Rien ne pouvait égaler leur surprise.
A quoi attribuer la mutation survenue ?
Demburu dit :
« D'habitude fils de ma mère, l'abeille butine un arbre en fleurs
et ne se fatigue jamais dans les branches que la mort dessèche.
Nous de même changeons donc, et rendons-nous sous l'ombrage.
Abandonnons l'arbre que la nature a quitté. »
Les trois amis prirent leurs affaires, décampèrent.
Ils allèrent se glisser sous la fraîcheur
de l'arbre qui venait de ressusciter.
Ce fut alors que Hamtuudo déclara
« Il n'y a pas l'ombre d'un doute ;
nous voici engagés au pays des miracles.
Les yeux voient des phénomènes
que la raison ne comprend pas.
Tout ce qu'on voit est Kaydara.
Tout ce qu'on entend va chez Kaydara.
Notre maître est Kaydara.
Pourquoi le cœur ne voit-il pas
et n'enseigne-t-il pas le sens des symboles
qui nous intriguent dans les terres
du royaume de Kaydara ?
Notes
1. La nourriture matérielle peut être remplacée par d'autres forces ; en initiation, un disciple peut jeûner tout un jour ; il dit alors : « Je n'ai pas faim car je dîne de la parole du maître ».