Cahiers de l'Homme. École Pratique des Hautes Études, VIe section. Mouton et Cie. Paris, 1961, 95 pages.
[1] Après le onzième nœud, Sile demande le second bâton de pâtre.
[2] Le charme des charmes pastoraux, fait d'un nœud aux vingt-deux enlacements, est en relation avec « les vingt-deux bovidés ancestraux » nogay e ɗiɗi na'i mawɗi, sortis de la mer avec Caanaba, et qui ont engendré tous les autres. Chacun d'eux a une propriété particulière en relation avec les familles Fulɓe, le pastorat et l'initiation.
Le mugissement du bœuf, buu, est répété deux lois, ces deux temps soulignent le va-et-vient de la transhumance. Le bœuf mugit au jeeri comme au waalo.
[3] Après le douzième nœud, Sile possède tous les attributs pastoraux énumérés plus haut ; il reçoit alors tous les pouvoirs.
[4] La lutte que devra poursuivre Sile, armé maintenant, mais seul, se mènera entre « la haute brousse » jeeri et « le bord du fleuve » waalo, c'est-à-dire sur le trajet de la transhumance.
Le lion symbolise tout d'abord la force temporelle avec tout ce qu'elle comporte de grandeur et de rigueur, mais également la force occulte, car il est considéré comme le « chat des génies ». Sile doit vaincre le lion et l'asservir à sa volonté : en faisant couler son sang, véhicule de sa force, il la prendra pour affermir la sienne. Il exercera, dans cette lutte ultime, qui est une épreuve, sa force d'initié contre une autre force. Ceci fait que Sile est prêt.
[1] — Salut à celui qui vient de dénouer l'énigme du onzième des douze et du dix-neuvième des vingt-huit. Que Sile choisisse ce qu'il veut posséder. » Sile demanda un second bâton de pâtre. Foroforondu lui en donna un en bois de nelɓi et continua ses questions par : « Sile, qu'est-ce que ceci ? »
Sile s'accroupit et dit : « Il ne m'appartient pas, ô femme de Kumen, déesse de la terre et des mammifères, de violer le secret de ton père Morimawɗo. »
[2] Foroforondu sourit et dit : « Sile, ceci est le douzième des douze et le vingtième des vingt-huit enlacements. C'est un nœud qui en contient un autre de vingt-deux enlacements. C'est le charme des charmes pastoraux. Il a nom buubu, prénom pullo spécifique. Le bœuf le beugle en deux temps : buu… bu… Pour récompenser ta discrétion, je te donne la propriété absolue de ndett, je te donne le pouvoir sur les esprits de sous la terre. »
[3] Ainsi, Sile reçut tout pouvoir de Kumen et de sa femme Foroforondu.
Il possède l'anneau d'alliance et les deux bâtons de commandement pastoral. Il ne lui reste plus qu'à prendre congé de ses initiateurs et à revenir aux pays des hommes.
[4] Kumen dit à Sile : « Je vais te ramener à la lisière de mes domaines et t'y abandonner à tes propres forces. Tu n'auras plus qu'une lutte à mener contre le lion d'entre jeeri et waalo. Il porte entre les sourcils une touffe de poils. Tu le tueras. Pour cela, il te suffira de réciter l'incantation à jalaañ et de le frapper sur le nez. Il perdra connaissance et sera à ta merci. Tu l'égorgeras. Tu le brûleras tout entier après avoir arraché la touffe. Celle-ci sera cousue dans une bande de coton. Ce talisman mis sous la tête d'un dormeur, quel qu'il soit, provoquera un rêve au cours duquel le vrai nom de la vache sera donné par un esprit des eaux, pasteur de bovidés marins. ».