Cheikh Hamidou Kane/L'Aventure ambiguë/
Paris, Julliard, 1961. 209 pages
Chapitre II
-ta-t-il s'adressant toujours au groupe, votre prince ne l'est pas seulement de sang ! Il lui faut tout ! Il est aussi prince de l'esprit !
D'ailleurs, le grand maître lui-même le sait. L'avez-vous remarqué ? Il a un faible pour Samba Diallo.
— Tu mens ! Tais-toi, Demba, tu sais bien que tu mens ! Le maître ne peut pas avoir de préférence pour moi et …
Il s'interrompit et haussa les épaules.
Il était à quelques pas de Demba. Les deux jeunes gens avaient à peu près la même taille, mais tandis que Samba Diallo, qui d'impatience dansait lentement sur une jambe puis sur l'autre, était tout en lignes longues et nerveuses, Demba, lui, était plutôt rondelet, paisible
et immobile.
Samba Diallo se détourna lentement et marcha de nouveau vers le portail qu'il franchit.
Dans la ruelle, il sentit derrière lui le mouvement lent de ses compagnons qui le suivaient.
— Il a toutes les qualités, sauf une cependant, il n'est pas courageux.
Samba Diallo s'immobilisa, déposa sa sébile à terre et revint à Demba.
— Je ne tiens pas à me battre avec toi, Dembel, lui dit-il.
— Non, hurla l'interpellé. Ne m'appelle pas Dembel. Pas de familiarité.
— Soit, Demba. Mais je ne veux pas me